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L'enseigne du petit salon de coiffure grésille timidement, comme un dernier murmure de vie, pendant que la pluie martèle le toit des voitures et des maisons de ce petit quartier portugais. J'allume une cigarette en bataillant contre les éléments et pousse la porte entrouverte.

Une forte odeur de laque et de patchouli m'envahit les narines, tandis que mes yeux parcourent les infinis dégradés de fuschia et d'orange qui constituent le mobilier de ce temple local dédié à la beauté des grands-mères du voisinage. Les mèches de cheveux éparses qui jonchent le sol, ainsi que les ciseaux et le peigne visiblement jetés à la hâte, montrent avec quelle précipitation l'endroit s'est vidé. Le son de mes talons résonne sur le carrelage tandis que je m'approche du corps sans vie du propriétaire des lieux, gisant dans une mare de sang au pied d'un poster grandeur nature de Bonnie Tyler.

Même criblée de balles, sa dépouille conserve cette beauté solaire qui lui a valu tant de succès. Déjà la Brume s'affaire à occulter la débauche de surnaturel qui a envahi la pièce. Piochant dans mon sac à main, je sors le petit miroir que m'a confié Merlin et et y contemple le reflet de la scène. J'y vois son emblématique arc d'argent devenu un simple glock un peu trop rutilant, tandis que la guitare brisée à ses pieds n'est nulle autre que sa lyre d'or à jamais silencieuse. Mes hypothèses étaient donc justes, même si je ne suis manifestement pas la première à l'avoir reconnu. J'espère simplement qu'Artémis me pardonnera d'être arrivée trop tard.

Alors qu'un petit poste de télévision miraculeusement préservé continue à diffuser les images silencieuses d'une quelconque telenovela, mon esprit s'égare dans une comparaison moqueuse avec le panthéon grec et son lot de drama queens mal fagotées. Un reflet dans l'écran trahit toutefois le lent mouvement de la porte du salon derrière moi. Je distingue une silhouette voûtée, mais bien trop massive à mon goût. J'écrase ma cigarette et invoque le nom d'Excalibur, qui se matérialise à mes côtés. Fait chier, mon tailleur sort à peine du pressing.

Laura Whiteborough, détective privé…. a.k.a Arthur Pendragon.

cityofmist/start.1655330038.txt.gz · Dernière modification: 15/06/2022 23:53 de admin